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À la rencontre de Gianfranco Gianfrate, un professeur que la passion pour les recherches en finance durable place au coeur du changement

Gianfranco Gianfrate , Professor

Grâce à des contributions remarquées dans des journaux académiques majeurs et dans le 6e rapport du GIEC, Gianfranco Gianfrate, professeur à l'EDHEC Business School, ne se contente pas de suivre l'évolution du secteur financier : il cherche à avoir une longueur d'avance sur les profondes transformations nécessaires pour ouvrir la voie à un monde durable. Universitaire dans l'âme, il se nourrit de la liberté de la recherche, du défi constant de l'enseignement et de l'impact tangible de son travail.

Temps de lecture :
17 fév 2025
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Lorsqu'il commence son premier cycle en administration des affaires à l'université Bocconi de Milan, Gianfranco n'a aucune intention de suivre la voie de l'entreprise ou de l'université : « Au départ, je voulais être journaliste parce que j'adore écrire », dit-il. « J'ai commencé à collaborer avec des journaux et des magazines, mais j'ai vite été déçu. J'ai réalisé que je pouvais utiliser l'écriture comme un moyen plutôt que comme une fin. »

Il a un premier aperçu de ce que sa passion pour l'écriture peut lui apporter juste après avoir obtenu sa licence, lorsqu'il devient Assistant de recherche à l'université Bocconi pendant quelques mois en 1999.

 

Si le monde universitaire lui offre une liberté précieuse et éveille son intérêt pour une carrière universitaire, Gianfranco cherche alors une expérience pratique dans les domaines qu'il souhaite potentiellement étudier. Il passe les trois années suivantes à travailler comme analyste business et finance pour des cabinets de conseil de premier plan, se plongeant dans l'essor du commerce électronique et la dynamique des fusions et acquisitions.

 

Il retourne ensuite à l'université Bocconi pour démarrer un doctorat, explorant les raisons du dysfonctionnement de la démocratie en entreprise (corporate democracy) en Italie. Sa thèse, intitulée Shareholders’ coalitions and control contestability: the case of Italian voting trust agreements, est publiée en 2006. Bien qu'il ait alors commencé à donner des cours de finance à l'université Bocconi, Gianfranco reporte le démarrage effectif de sa carrière universitaire pour réaliser une expérience supplémentaire en entreprise, en dehors de l'Italie.

 

 

« Les quatre années que j'ai passées en tant que manager chez Hermes Investment Management à Londres ont été parmi les meilleures de ma vie », se souvient Gianfranco. Chez Hermes, principal gestionnaire du régime de retraite de British Telecom, il faisait partie d'une équipe jeune et internationale, axée sur les marchés italien et scandinave, et se déplaçait chaque semaine pour rencontrer des PDG et des membres de conseils d'administration. Il se positionne alors à l'avant-garde des changements en cours dans le secteur financier européen. Hermes a été en effet un pionnier de la finance durable, façonnant la gouvernance d'entreprise et l'élaboration des politiques aux plus hauts niveaux.

C'est là que Gianfranco acquiert des connaissances inestimables sur l'intégration de la durabilité dans les entreprises et les pratiques d'investissement. En 2009, il organise le tout premier événement « United Nations for responsible investment ». Il échange fréquemment avec la Commission européenne sur ces sujets à une époque où la crise financière mondiale faisait se demander à tous comment construire un avenir meilleur.

« C'était absolument fascinant d'être au début de cette lame de fond », se souvient-il. « De parler avec des dirigeants pour qui le développement durable ne faisait même pas encore partie de leur vocabulaire, de semer les graines du changement et de jouer un rôle actif du point de vue de l'investisseur. »

 

À long terme, cependant, Gianfranco aspire à retrouver le rythme plus mesuré du monde universitaire, et le caractère pionnier que contient toute activité de recherche. En 2014, après quelques années à l'université Bocconi, il a l'opportunité de devenir chercheur à la Kennedy School of Government de l'université Harvard.

 

Alors qu'il prépare un master en Administration publique, il propose une étude novatrice fusionnant ses deux sujets de prédilection : l'évaluation des entreprises et le changement climatique. En 2014, c'était une proposition inédite, et Gianfranco développe rapidement son sujet dans un environnement inspirant. « Les discussions, les gens, tout était extraordinaire », explique-t-il. « A tout moment il était possible d'entrer dans une salle de réunion et de rencontrer, par exemple, le secrétaire général de l'OTAN. »

A cette période, il développe des idées nouvelles pour mesurer l'impact du climat sur l'évaluation des entreprises et la manière dont ce dernières peuvent tirer parti de cette compréhension pour affiner leurs stratégies de levée de capitaux. Il co-publie alors deux ouvrages : The Valuation of Financial Institutions (Wiley) (2) et Corporate Valuation: Measuring the Value of Companies in Turbulent Times (Wiley) (3).

 

 

Fort d'un nouveau diplôme et de plusieurs publications dans le Journal of Private Equity (4), Gianfranco retourne ensuite en Europe. Il occupe d'abord un poste de chargé de cours à l'université Erasmus de Rotterdam avant de devenir Professeur de finance à l'EDHEC en 2018. Dès sa première année, il organise une grande conférence sur la finance climatique à Paris pour, notamment, développer la notoriété de l'EDHEC sur ce sujet. Il développe également de nouveaux cours sur la finance durable, lance un cours en ligne très populaire, ouvert à tous (MOOC) et poursuit ses recherches sur l'évaluation des entreprises à l'ère de la responsabilité.

Chercheur dans l'âme et au quotidien, Gianfranco s'investit pleinement dans la compréhension de la façon dont les entreprises perçoivent le risque climatique et de ce qu'elles font en interne pour y faire face. Bien qu'il décrive ses contributions académiques en des termes très modestes, ses récentes réalisations en disent long. Durant ces quelques dernières années, il a abordé des sujets variés et publié de nombreux articles comme « The Agency of Greenwashing » (5) dans The Journal of Management and Governance, « Resilience of ESG firms during the Covid-19 crisis » (6) dans The Journal of International Business Studies, et « What's in a shade ? The market relevance of green bonds' external reviews » (7) dans The British Accounting Review.

 

Entre 2019 et 2023, il a également contribué au sixième rapport d'évaluation du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), en travaillant sur la prise en compte de la finance comme un des solutions face au changement climatique. « Participer à l'élaboration des politiques est extrêmement important », explique-t-il. « Surtout pour lutter contre le greenwashing et favoriser le dialogue entre les institutions et les entreprises. Les entreprises et les marchés ne nous aideront pas à atteindre des objectifs climatiques ambitieux à eux seuls, car ils sont peu incités à le faire aujourd'hui. La finance doit faire partie de la solution, mais nous devons cesser de croire qu'elle est la solution. »

 

Côté enseignement, Gianfranco pousse les étudiants à repenser la manière de valoriser une entreprise et d'appliquer des formules mathématiques. Il partage son expérience de la subjectivité, un « instinct » qu'il espère leur inculquer. « Je ne changerais de travail pour rien au monde », dit-il. « J'aime la liberté du monde académique, le défi constant de confronter de nouvelles idées, le sentiment d'utilité que me procure le partage de mon point de vue avec les étudiants et l'impact de notre travail. »

 

Dates clés

Depuis 2018: Professeur de finance, EDHEC Business School, Nice (France)

2022 - 2025: EDHEC-Risk Climate Impact Institute Research Director

2017 - 2018: Lecturer in Sustainable Finance, Erasmus University, Rotterdam (Pays-Bas)

2014 - 2017: Giorgio Ruffolo Fellow, Kennedy School, Harvard University, Cambridge (Etats-Unis)

2008 - 2011: Manager, Hermes Investment Management, London (Grande-Bretagne)

2005 - 2014: Assistant Professor of Finance, Bocconi University, Milan (Italie)

2003 - 2006: PhD in Business Administration & Management, Bocconi University, Milan (Italie)

2002 - 2003: Financial Analyst, Deloitte Corporate Finance, Milan (Italie)

2000 - 2001: Business Analyst, Valdani Vicari & Associati, Milan (Italie)

1999 - 2000: Research Assistant, Bocconi University, Milan (Italie)

1999: Bachelor’s in Business Administration, Bocconi University, Milan (Italie)

 

Pour en savoir plus sur Gianfranco Gianfrate

Références

(1) Shareholders’ coalitions and control contestability: the case of Italian voting trust agreements (2007) Corporate Ownership & Control. Volume 4, Issue 4,  Summer 2007 - https://virtusinterpress.org/IMG/pdf/cocv4i4c4p3.pdf

(2) The Valuation of Financial Companies: Tools and Techniques to Measure the Value of Banks, Insurance Companies and Other Financial Institutions (2014) Mario Massari, Gianfranco Gianfrate, Laura Zanetti. Wiley publishing, ISBN: 978-1-118-61733-5 - https://www.wiley.com/en-us/The+Valuation+of+Financial+Companies%3A+Tools+and+Techniques+to+Measure+the+Value+of+Banks%2C+Insurance+Companies+and+Other+Financial+Institutions-p-9781118617335

(3) Corporate Valuation: Measuring the Value of Companies in Turbulent Times (2016) Mario Massari, Gianfranco Gianfrate, Laura Zanetti. Wiley publishing, ISBN: 978-1-119-00333-5 - https://www.wiley.com/en-us/Corporate+Valuation%3A+Measuring+the+Value+of+Companies+in+Turbulent+Times+-p-9781119003335

(4) Sovereign Wealth Funds’ Investments and Corporate Bondholders (2017), Journal of Private
Equity - https://www.jstor.org/stable/26478030

Crowdfunding and Venture Capital: Complements or Substitutes? (2016) with M. D’Ambrosio,
Journal of Private Equity, Vol. 20, No. 1: pp. 7–20 - https://www.jstor.org/stable/44396812

Who is the Sovereign among Sovereign Wealth Funds: A Network Analysis of Co-
Investments
(2016) with E. Merlin, Journal of Private Equity, Vol. 19, No. 4: pp. 7–18 - https://www.jstor.org/stable/44396801

Private Equity throughout the Financial Crisis (2015) with S. Loewenthal, Journal of Private
Equity, Vol. 19, No. 1: pp. 14–26 - https://www.jstor.org/stable/43967366

(5) Ghitti, M., Gianfrate, G. & Palma, L. The agency of greenwashing. J Manag Gov 28, 905–941 (2024) - https://doi.org/10.1007/s10997-023-09683-8

(6) Gianfrate, G., Rubin, M., Ruzzi, D. et al. On the resilience of ESG firms during the COVID-19 crisis: evidence across countries and asset classes. J Int Bus Stud 55, 1069–1084 (2024). https://doi.org/10.1057/s41267-024-00718-2

and see also "Were ESG firms really more resilient during the COVID-19 crisis?", EDHEC Vox, Jan. 2025.

(7) Marco Ghitti, Gianfranco Gianfrate, Florencio Lopez-de-Silanes, Marco Spinelli. What’s in a shade? The market relevance of green bonds’ external reviews (2023) The British Accounting Review,101271, ISSN 0890-8389 - https://doi.org/10.1016/j.bar.2023.101271

and see also "A look at the importance of certifying “green” credentials for corporate debt", EDHEC Vox, Feb. 2025

 

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