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Entreprises : quels sont vos points faibles en matière de lancement d'alerte ?

Wim Vandekerckhove , Professor

Dans cet article, initialement publié en anglais dans HR Magazine, Wim Vandekerckhove, professeur à l'EDHEC, analyse pourquoi et comment les lancements d'alerte pourraient être mieux gérés si les entreprises pouvaient travailler sur leurs « angles morts ».

Temps de lecture :
6 déc 2024
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Selon un rapport publié en 2021 par EQS Group (1), environ 75 % des entreprises britanniques disposent d'un canal de signalement permettant aux travailleurs de faire part de leurs préoccupations concernant des actes répréhensibles.

 

Nos travaux récents (2) suggèrent que les personnes qui évaluent les lancements d'alerte (sous forme de rapports notamment) sont confrontées à des contraintes de temps et à des attentes contradictoires de la part des salariés, des managers et du conseil d'administration.

 

Les lanceurs d'alerte veulent savoir ce qui est fait pour donner suite à leur rapport. Ils s'attendent à ce que les ressources humaines ou le service "compliance" soient de leur côté.

Le conseil d'administration, quant à lui, souhaite que les canaux de signalement perturbent le moins possible l'entreprise. Le CA peut insister sur le fait de contenir le nombre de rapports transmis par ces canaux, mais il a rarement une idée de ce qu'est un « bon » nombre.

En outre, le CA souhaite généralement que les cas soient résolus et clos le plus rapidement possible (3). En ce sens, les RH et la conformité peuvent se trouver prises entre deux feux.

 

Il va de soi que les rapports de lancement d'alerte justifient un suivi approprié. Toutefois, les enquêtes peuvent être coûteuses et prendre du temps. Il arrive aussi souvent que les preuves ne soient guère plus qu'un ensemble de points de vue et de récits d'incidents, permettant aux RH ou à la conformité de dire quelle version de l'histoire est plus plausible que l'autre, mais rien qui tienne la route devant un tribunal. Par conséquent, une enquête peut sembler risquée si le lanceur d'alerte ne dispose pas de preuves irréfutables.

 

Selon certaines recherches comportementales (4), la pression du temps et l'évitement du risque créent souvent des « angles morts » qui peuvent conduire à une mauvaise prise de décision. Par exemple, nous nous attendons souvent à ce que ces rapports de signalement soient parfaits : qu'ils soient bien rédigés, qu'ils contiennent des preuves claires et qu'ils mettent en évidence des manquements à l'intégrité indéniables. Or, la réalité est tout autre, ce qui conduit de nombreux responsables des ressources humaines et de la conformité à se sentir "déçus" par le dispositif et par ceux qui les utilisent. Mais cela n'est pas toujours justifié.

 

Une étude de la Griffith University (5) en Australie a révélé qu'en moyenne, seuls 19 % des rapports rapportent une violation manifeste de l'intégrité, tandis que près de 34 % rapportent un grief personnel. Plus important encore, 47 % sont un mélange des deux, et ces rapports sont les plus susceptibles d'être mal gérés. Le fait est que notre déception à l'égard des rapports de lancement d'alerte imparfaits peut nous amener à les classer dans une catégorie différente plutôt que d'y voir des signes d'incertitude et d'hésitation.

 

Nous supposons volontiers, mais à tort, que les gens connaissent les termes précis et corrects pour décrire ce qui se passe, ou qu'ils ont une idée claire du fait que ce dont ils s'inquiètent est un acte répréhensible. En réalité, les gens hésitent, restent vagues ou se concentrent sur des détails non pertinents.

 

Quels que soient les canaux de signalement, leur efficacité exige que plusieurs services internes d'une organisation fonctionnent bien ensemble pour tirer la sonnette d'alarme. Les récentes orientations élaborées par l'EDHEC Business School se fondent sur les meilleures pratiques internationales et les exigences de l'UE. Elles présentent une culture du lancement d'alerte qui dépend en grande partie de la gouvernance interne de l'organisation, de la formation des employés, du retour d'information et des garanties de confidentialité et de protection.

Nous avons mis au point, avec nos partenaires, SUSA - Speak-Up Self-Assessment (6), un outil en ligne gratuit que tout professionnel de l'intégrité peut utiliser (de manière anonyme) pour mesurer la qualité de ses canaux et de sa culture de la prise de parole et du signalement.

 

Il est dans notre intérêt à tous de dénoncer les actes répréhensibles sur le lieu de travail et de réagir correctement aux signaux d'alerte qui nous sont présentés.

 

 

Références

(1) Whistleblowing Report 2021: A comprehensive study on whistleblowing in European companies - https://www.integrityline.com/en-gb/expertise/white-paper/whistleblowing-report/

(2) Smaili, N., Vandekerckhove, W. & Arroyo Pardo, P. Handling Whistleblowing Reports: The Complexity of the Double Agent. J Bus Ethics 186, 279–292 (2023). https://doi.org/10.1007/s10551-022-05176-0

(3) Honey Wyatt, July 2024, Whistleblowing tribunals rise: What can HR do? - https://www.hrmagazine.co.uk/content/news/whistleblowing-tribunals-rise-what-can-hr-do/

(4) Diana L. Young, Adam S. Goodie, Daniel B. Hall, Eric Wu. Decision making under time pressure, modeled in a prospect theory framework (2012). Organizational Behavior and Human Decision Processes, Volume 118, Issue 2 - https://doi.org/10.1016/j.obhdp.2012.03.005

(5) Most deserving whistleblowers get no protection new research shows (2021), Griffith University - https://news.griffith.edu.au/2021/11/11/most-deserving-whistleblowers-get-no-protection-new-research-shows/

(6) See "The BRIGHT Project", funded by the European Commission (EACEA – project 101143234), a collaboration between EDHEC Business School, the European Whistleblowing Institute, and the University of Galway - https://www.edhec.edu/en/research-and-faculty/departments/management-and-humanities/bright-project

 

 

Photo de Noah Buscher via Unsplash