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Michelle Sisto : « En tant que dirigeant ou manager, en particulier dans les périodes difficiles, si vos paroles ne correspondent pas à votre comportement, vous n'inspirerez personne »

Michelle Sisto , Associate Professor

Dans cette interview, publiée initialement sur Medium par Y. Weiner, Michelle Sisto, Professeure associée à l'EDHEC, partage ses idées et son expérience pour la série « Five Things You Need To Be A Highly Effective Leader During Turbulent Times ».

Temps de lecture :
4 Sep 2024
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  • Pour lire la version initiale complète, en anglais, de cette interview (juin 2024 - Medium), suivre ce lien

 

Merci beaucoup pour le temps que vous nous accordez ! Nos lecteurs aimeraient vous connaître un peu mieux. Pouvez-vous nous parler un peu de votre parcours ?

 

J'ai grandi dans la banlieue de Washington DC et j'ai étudié les mathématiques et l'informatique à l'université de Georgetown. J'ai toujours été très intéressée par l'approche quantitative. Lors de ma troisième année à Georgetown, j'ai étudié à l'étranger à l'université de Nice, et c'est ainsi que je me suis retrouvée en Europe. C'était une expérience immersive fantastique. J'ai appris à parler couramment le français et l'italien, car c'est là que j'ai rencontré mon mari. Je suis retournée à Nice après avoir obtenu mon diplôme pour faire mon master et je suis restée en Europe depuis !

 

Cette exposition précoce à la vie internationale a joué un rôle important dans ma vie et contribue à mon engagement au sein de QTEM. Je crois fermement que les échanges et la vie à l'étranger peuvent transformer les individus et améliorer la compréhension internationale. J'ai continué à étudier les mathématiques et l'informatique pour mon master, et après de nombreuses années d'enseignement de ces matières à des étudiants d'écoles de management, en 2008, j'ai décidé de changer un peu de cap et de faire un doctorat en finance à l'EDHEC.

Je trouvais en effet que la finance était un domaine intéressant, où je pouvais appliquer mes connaissances en mathématiques et informatique, et j'ai continué à travailler dans des écoles de management depuis lors. J'ai dirigé le MBA de l'EDHEC Business School pendant quelques années, puis j'ai été pendant six ans la doyenne associée en charge des programmes, nos formations étant alors dispensées sur trois campus et comptant environ 5 000 étudiants. QTEM est une option pour nos programmes de master et c'est ainsi que j'ai été impliquée pour la première fois dans ce réseau. Sa mission est naturellement alignée sur mes intérêts personnels - expérience interculturelle et multiculturelle autour de sujets quantitatifs impliquant les statistiques, l'analytique et la science des données.

 

Cette année, je suis en congé sabbatique parce que je suis prête à changer à nouveau. J'ai la chance de passer l'année à étudier l'IA et l'IA générative, à revenir à mon premier amour, l'informatique, et à me concentrer sur la manière dont nous pouvons et devons intégrer davantage cette technologie dans la stratégie de l'EDHEC et, bien sûr, à travailler avec QTEM dans ce sens également. J'ai beaucoup appris et c'est très agréable d'être à nouveau étudiante !

 

Où avez-vous puisé la motivation nécessaire pour continuer à relever des défis ?

J'aime résoudre les problèmes, et je considère donc les périodes difficiles comme une occasion d'essayer quelque chose de différent ou de pivoter un peu et de changer de perspective. J'aime également énormément les contacts humains, et je dirais donc que ma motivation est de collaborer avec différentes équipes et de faire en sorte que tous les membres soient impliqués et motivés face à ces défis.

 

Toute ma carrière a été orientée vers le monde universitaire, l'enseignement et l'apprentissage, et je considère donc toujours les défis comme quelque chose que nous devons surmonter pour le bien de nos étudiants. Si vous vous concentrez vraiment sur ce qui est bon et juste pour eux, cela tend à faire baisser la tension et à multiplier les occasions de trouver des solutions.

 

Les livres ont le pouvoir de changer la vie. Avez-vous dans votre vie un livre qui vous a marqué et inspiré pour devenir un leader efficace ?

C'est une question difficile car je suis une lectrice passionnée. À tout moment, j'ai sur ma table de nuit une variété de livres et, selon mon humeur, j'en choisis un.

 

Parmi les ouvrages de non-fiction qui ont eu une forte influence sur moi, certains traitent des sciences cognitives : Predictably Irrational de Dan Ariely, Freakonomics ou Think Like a Freak de Steven Levitt et Stephen Dubner. Je trouve que ce type de livres m'aide vraiment à envisager les problèmes sous différents angles et à comprendre, lorsque je travaille avec d'autres personnes, quels sont les préjugés que nous avons tous dans notre quotidien et comment y remédier. Si nous parvenons à changer d'état d'esprit pour aborder un problème sous un angle légèrement différent, cela ouvre souvent la voie à d'autres solutions. Je trouve cette compréhension de la manière dont les gens pensent et raisonnent vraiment fascinante.

 

Je lis également beaucoup de livres de fiction qui, pour moi, touchent vraiment à notre humanité et nous permettent de sortir de nous-mêmes, de voir les choses du point de vue d'autrui. J'ai tendance à apprécier les livres ancrés dans des cultures que je ne connais pas. J'ai adoré Kite Runner. Je viens de lire A Passage North, et Life of Pi est l'un de mes livres préférés. C'est un livre incroyablement intelligent et le protagoniste prend souvent du recul et se rend compte que ses problèmes et lui-même sont plutôt limités et petits dans le grand schéma de la nature et du monde, pour ensuite se concentrer sur la gratitude. J'ai également apprécié le fait qu'il vous laisse à la fin avec cette question de ce qui est réel et de ce qui ne l'est pas, ce qui, je pense, est très pertinent pour essayer de comprendre l'humanité. Nous vivons tous des réalités différentes et cela s'aggrave aujourd'hui avec l'IA. Mais même sans cela, nous pourrions quitter la même conversation et en ressortir avec deux perspectives très différentes sur cette réalité.

 

Lorsque l'avenir semble incertain, quel est le meilleur moyen de remonter le moral des équipes ? Que peut faire un dirigeant pour inspirer, motiver et impliquer tout le monde ?

L'incertitude a toujours existé et existera toujours. L'enseignement des statistiques m'a peut-être permis d'acquérir une certaine aisance dans l'acceptation de l'incertitude. Il y a des moments où elle peut être plus précis, ou plus transversal. La pandémie a été une période absolument marquante. L'IA prend une place croissante dans notre vie quotidienne et au travail, partout dans le monde, même si elle n'est pas répartie uniformément.

 

Je dirais tout de même que les compétences et attitudes utiles en période de difficulté sont celles que vous utilisez lorsque les choses vont bien, c'est-à-dire être authentique, écouter vos équipes et essayer de vous mettre à la place de vos interlocuteurs pour vraiment comprendre leurs besoins et leurs préoccupations. Il faut multiplier les occasions de découvrir leurs points de vue afin que votre vision s'élargisse.

 

Lorsque vous communiquez sur les étapes à venir, veillez à ce que les différentes parties prenantes sachent qu'elles ont été entendues. Même si vous n'allez pas dans la direction que certains préfèrent, reconnaissez leur point de vue tout en expliquant les raisons de la direction choisie.

Restez optimiste et répétez : « D'accord, c'est une période difficile, mais nous nous en sortirons et cela créera des opportunités que nous ne voyons sans doute pas encore ». Les échanges réguliers et l'optimisme, même face à l'adversité, m'aident vraiment à rester motivée et à motiver les autres.

 

Comment un dirigeant ou un manager peut-il faire des projets lorsque l'avenir est si imprévisible ?

Autrefois, il était courant d'avoir un plan stratégique sur 5, 10 ou 15 ans. Aujourd'hui, tout le monde est beaucoup plus conscient du fait qu'il va falloir être agile et capable de changer et de s'adapter à des circonstances changeantes. Cependant, il faut disposer d'un plan à partir duquel on peut s'adapter.

La psychologie humaine est marquée par le besoin d'avoir une vision de l'endroit où l'on va. Cette vision peut changer au fil du temps, mais si vous ne prenez pas de décision et ne définissez pas de vision pour l'avenir, les gens se sentent perdus et se démotivent très rapidement...

 

To read the full original version of this interview in English (June 2024): visit medium.com